Il est urgent de voir évoluer le modèle d’apprentissage de la technique de pédalage qui continue à présenter le mouvement comme une mécanique sur laquelle il faut “pousser et tirer“. Le geste est complexe. Pédaler n’est pas une question de “force” ou de “vélocité” mais une réponse intelligente du cycliste aux exigences du terrain. Le but ? Etre efficace et économe.
En ce qui concerne la technique de pédalage, on a tout entendu…
Pédaler rond, pédaler plus souple, pousser, tirer…
Pour certains, il faut mouliner l’hiver, faire des côtes en force le printemps venant, monter en force et puis en vélocité…
Pour d’autres – ou les mêmes – il faut faire des exercices à une seule jambe ou de l’hyper vélocité…
Stop ! Le corps humain n’est pas un objet mécanique !
C’est curieux que l’on continue à penser, comme au début du siècle précédent, en assimilant le mouvement de pédalage à un système articulé, mécanique sur lequel il revient de tirer ou de pousser pour l’activer.
Le corps humain est une machine intelligente. Ce n’est pas une question de force ou de vélocité. Mais d’équilibre entre les différents facteurs, pour que le cycliste adapte son pédalage aux exigences du parcours dans le but d’être le plus efficace possible.
Apprendre à la technique de pédalage
Dès le plus jeune âge, une fois résolues les questions d’équilibre, on pédale naturellement. Pourtant, même si la technique de pédalage est quasi automatisée, elle n’en reste pas moins technique et complexe.
- Technique parce qu’il exige des coordinations sensori-motrices spécifiques.
- Complexe parce qu’il repose sur la maîtrise de nombreux éléments différents : muscles, segments, articulations…
La technique de pédalage s’inscrit progressivement en mémoire, un programme moteur semi-volontaire. Plus il est pratiqué correctement plus le modèle se renforce. Dans le même temps, le cycliste doit se construire un ensemble de réponses efficaces et économiques pour adapter sa technique de pédalage au terrain et aux enjeux liés à sa pratique.
Donc, rien n’est simple quand on parle de pédalage. Faisons un peu le point.
La technique de pédalage est un système organisé pour produire de l’énergie
- L’énergie nécessaire à la propulsion de la manivelle provient de 4 muscles principaux.
- Fessiers et quadriceps produisent de 37 à 55% de la puissance totale lors du mouvement d’extension (poussée).
- Ischio-Jambiers et psoas-iliaques sont mis à contribution lors de la phase de flexion. Les ischio-jambiers génèrent, dans l’ensemble, 26% de la puissance totale.
- L’énergie ainsi produite est transférée par le chef court du biceps fémoral et par les muscles des mollets et lors de la remontée de la pédale par le tibial antérieur. Ces muscles doivent être toniques, solides pour absorber et transférer l’énergie.
- Enfin, l’énergie est transmise à la pédale. Pour cela, les muscles de la cheville et des pieds doivent être fermes pour maintenir le pied à l’horizontal durant tout le trajet moteur. Il s’agit d’assurer la continuité du mouvement lors du passage des points morts.
La technique de pédalage est un modèle de coordination musculaire.
- Sans l’activité contradictoire des muscles antagonistes, la phase de poussée de la pédale ne serait pas contrôlée. Sans ce guide, le genou part vers l’extérieur, en canard. Si cette coordination n’est pas suffisamment maîtrisée, elle devient un frein qui s’oppose à la poussée ordinaire sur la pédale.
- Malgré les forces contradictoires qu’elle subit, la cheville est suffisamment mobile pour maintenir horizontalement le pied et ferme pour transmettre l’énergie générée plus haut. On voit trop souvent la pointe du pied plonger en début de poussée et un talon remonter exagérément lors de la traction. Ces gestes pas maîtrisés provoquent une perte d’efficacité importante.
- Le déplacement du pied assure la continuité du pédalage lors du passage des points morts haut et bas. Une action volontaire est indispensable pour maintenir la vitesse de rotation de la pédale au moment où la force est minimale.
- Au niveau d’un groupe musculaire l’activation des muscles est coordonnée. L’activité du grand droit et des fessiers débute juste après le passage du point mort et dure jusque 100°. Le grand droit reprend du service entre 270° et 360°, coordonné à l’activité des ischio-jambiers et des mollets.
- Enfin, lorsqu’un membre effectue la poussée, l’autre assure la traction. Cette coordination dite « en opposition de phase » est délicate. Le membre qui remonte doit être tractée pour ne pas provoquer de force résistante sur la pédale. S’il est peu actif, le membre qui pousse doit, dans ce cas, réaliser un travail mécanique supplémentaire pour soulever l’autre membre.
Si aucun apprentissage n’a été réalisé, il est fort probable que les habiletés spécifiques à la maîtrise de la technique de pédalage ne soient pas installées. Ce qui nuit à l’efficacité et par conséquent, à la performance. Il est nécessaire d’acquérir le geste juste et de répéter le mouvement pour le stabiliser.
Des exemples de séance à réaliser sur home-traîner
Les séances suivantes se déroulent sur Home-traîner équipé d’un capteur de puissance tel qu’on en trouve sur les récents modèles (Tacx Bushido, Satori…). Cela permet de contrôler avec précision les intensités de travail et de donner les consignes nécessaires.
[Des clefs pour le renforcement musculaire]
Exemple n°1 – le « 2’/1′ »
Le principe est de répéter la séquence indiquée dans le titre selon la structure suivante : 4 x 10′ [(2’/ 1′) x3 ]. Une minute de récupération toute les 10’.
On alterne 2′ à 60% PMA et 1′ à 75% PMA.
Il s’agit principalement d’une séance de récupération sur laquelle on vient greffer un travail spécifique de pédalage. On profite de cette structure pour indiquer au cycliste les points sur lesquels porter l’attention.
Par exemple, dans la vidéo suivante, on insiste sur la traction de la pédale et le rôle de l’ischio-jambier dans le retour de la pédale. Les variations fréquentes d’intensité forcent le cycliste à ajuster les différents paramètres lui permettant de réaliser le geste : force/vitesse.
On peut proposer, dans le prolongement, de cette séance des exercices de renforcement musculaire spécifiques à l’ischio-jambier.
Des Variantes de l’exercice
Les séquences de travail peuvent varier :
- 8 x 5′ (45″/15″) ou
- 8 x [4’/1′]
- On peut porter l’attention sur la poussée, le geste général, le travail du pied.
Exemple 2 – combinaisons « Force/vitesse »
Tout au long de la séance, on va maintenir la même intensité : 60% PMA. On alterne des séquences à une fréquence de pédalage de 50 RPM et de 90 RPM. De cette façon, les combinaisons force et vitesse vont changer. A 50 RPM, il faut augmenter la résistance du frein du home-trainer, à 90 RPM, la résistance est moins importante.
Le maintien à 60% PMA correspond à un travail de capacité aérobie où la consommation d’oxygène est stabilisée. Cela permet de se concentrer sur la qualité du pédalage.
Pédaler à 50 RPM est très exigeant.
- On se concentre sur les trois temps « création/transfert/transmission » de force tout en ajustant la vitesse pour répondre aux exigences de la consigne.
- La répétition des séquences permet d’inscrire le geste en mémoire. La mémorisation du geste est renforcée par l’augmentation progressive de la fatigue.
- Cette fatigue ressentie correspond à l’épuisement progressif des fibres musculaires impliquées. Elle oblige le cycliste à un effort de volonté pour en recruter de nouvelles.
Le passage à 90 RPM soulage les tensions ressenties par le cycliste. Cependant, l’intensité à respecter est identique. Il faut ajuster la force à produire à la nouvelle fréquence de pédalage.
Il est possible de complexifier les séances.
On peut introduire un changement d’intensité à réaliser toutes les deux minutes.
On peut sortir du modèle mécanique pour aller vers un nouvel apprentissage de la technique de pédalage qui laisse beaucoup de place à la réception des sensations. Le cycliste adapte sans cesse son pédalage pour rendre un geste efficace et économique.
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