L’exercice de l’unijambiste est-il utile pour apprendre à pédaler ?

Le cycliste a dans sa musette de nombreux exercices qui font partie de la tradition. Des incontournables qu’on utilise sans vraiment s’interroger sur leur efficacité, sur leur rôle dans la progression d’un cycliste.
L’exercice de  « l’unijambiste » en fait partie. On se l’échange sur tous les départs de sortie à vélo.
Mais est-ce vraiment nécessaire ? 

L’exercice de l’unijambiste consiste à pédaler avec une seule jambe pendant que l’autre ne réalise aucune action. Généralement, on alterne, une jambe et puis l’autre pour pédaler les deux en même temps pour une 3e phase. Bien souvent, chaque phase dure 1 minute ; on répète la séquence plusieurs fois. Par cet exercice, on cherche à faire prendre conscience des 4 moments principaux du pédalage : poussée, traction, passage des points morts haut et bas, un exercice analytique en quelque sorte.

La logique du pédalage

Le pédalage est un geste moteur particulier car il est placé sous la contrainte du pédalier qui impose le sens du mouvement. Les actions propulsives des deux jambes alternent tout en prenant en charge les phases basse et haute du geste, des temps morts. Dans ces conditions, les phases du mouvement sont en opposition : au moment où une jambe débute la  poussée,  l’autre jambe, en opposition, débute la traction. La mécanique impose deux temps morts préjudiciables à la continuité du mouvement.

Pour pédaler correctement, il est nécessaire de gérer des contraintes multiples qui pèsent sur le système : production d’énergie, gestion de la coordination, prise en compte du contexte… Dans ces conditions, l’expérience est déterminante mais aussi la représentation du geste de pédalage peut être, parfois, un frein à la réalisation d’un geste correct.

Le pédalage est un mouvement technique et complexe.

L’appui final sur la pédale, la transmission de force,  passe par la maîtrise de coordinations intermusculaires. Cela passe également par un ajustement des actions des deux membres qui travaillent, certes, en opposition mais avec un but commun de création/transfert/transmission d’énergie. Le geste global donne du sens à la production d’énergie : il faut ajuster les efforts entre les différents muscles, équilibrer les charges. Par exemple, il faut s’assurer que la jambe qui remonte soit tractée afin qu’elle ne soit pas un poids mort pour la jambe qui pousse. L’intensité de cette traction doit être juste pour ne pas créer un déséquilibre. C’est cet ensemble qui donne de la cohérence au pédalage en général.

pédales automatiques - unijambiste

Ce qu’on fait avec une seule jambe

En ne travaillant qu’avec une seule jambe, on se prive de tous ces ajustements, ces sensations qui permettent d’équilibrer le pédalage. Sans contrôle de la globalité du geste, la poussée et la traction se font sans repère d’intensité. Les niveaux de charge sont inadaptés aux besoins réels du pédalage. Si la résistance est faible, le  mouvement est difficilement contrôlable. Dès qu’on trouve la bonne résistance, on se rend compte que les efforts permettant de gérer la transition du point mort bas et la traction sont surdimensionnés par rapport aux intensités nécessaires lors d’un pédalage à deux jambes

En conclusion, l’unijambiste

Dans ces conditions, le mouvement à une jambe ne peut être répété trop longtemps. Pourtant, le pédalage a besoin de longues heures de pratique pour s’inscrire en mémoire et s’automatiser.

L’exercice de l’unijambiste est très éloigné des exigences du pédalage.  Il relève d’une conception analytique du geste moteur s’éloignant de la situation réelle. En termes d’apprentissage moteur, ce regard sur le geste de l’homme est dépassé. Il est inspiré par une vision thermodynamique du corps brûlant de l’énergie et produisant du travail mécanique (19e siècle).

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